A Calais, en France, des milliers d’exilés tentent de traverser la Manche pour rejoindre le Royaume-Uni, terre d’asile. Après un voyage de plusieurs mois jusqu’à la frontière franco-britannique, ce n'est qu'une quarantaine de kilomètres qui les sépare de ce paradis inaccessible. Une attente entraînant chez les gens une détresse psychologique immense.
Toutes les 48 heures, les forces de l'ordre expulsent les exilés des jungles de Calais. Parfois sans prévenir, comme aujourd'hui encore, ils se déplacent sur les lieux de vie avec de nombreux camions de CRS. Ils évacuent la zone, confisquant couvertures et affaires personnelles et perquisitionnant les tentes.
20 novembre 2021 : une chaussure jonche l’herbe d’un sol encore verdoyant pour un mois de novembre, abandonnée par un jeune réfugié qui pousse un lourd caddie de nourriture et de duvets. Comme les autres, il est forcé de quitter la jungle. De loin, l’un des membres des forces de l’ordre s’impatiente, face à des hommes plus âgés originaires d’Afghanistan qui ne parlent pas français : “Allez les bougnouls”. Ici, le racisme est omniprésent : dans toutes les jungles, les exilés témoignent de l’humiliation des forces de l’ordre à leur égard.
Entre les villes de Calais et Marck, la jungle de Old Lidl est un vaste terrain vague parsemé de flaques. Le 16 novembre, les autorités ont creusé un fossé anti-franchissement et construit une dune de terre et de rochers pour empêcher les associations d'apporter leur aide aux exilés. Après l'évacuation des nombreuses personnes par les forces de l'ordre, quelques regroupements persistent en bordure du terrain et plus loin dans les bois, des hommes installent une bâche entre deux arbres pour se protéger des futures intempéries.
Azamat* est à Calais depuis quelques mois déjà. Avec son frère, ils vivent dans la jungle de Hospital, en périphérie de la ville. Ils ont fui l'Afghanistan car il y a un an, une bombe a détruit leur maison, prenant la vie de leurs frères et sœurs et de leur mère. Ensemble, ils ont traversé l'Europe en quête d'une vie meilleure et de sécurité. Ici à Calais, ils attendent le bon moment pour traverser la Manche, dans l'espoir d'atteindre leur but : l'Angleterre.
À Calais, l'association Utopia 56 conduit des personnes en situation d'exil à l'arrêt de bus du CAES (Centres d'accueil et d'examen de la situation), où ils pourront embarquer direction des centres d'hébergement provisoire, pendant 11 jours maximum. Là-bas, ils pourront prendre du repos et entamer s'ils le souhaitent des démarches administratives comme les demandes d'asile.
Dans une zone industrielle de Calais, des femmes, hommes et enfants attendent le bus du CAES (Centres d'accueil et d'examen de la situation). Selon France Terre d'Asile, les CAES offrent un "premier toit aux personnes arrivants en France d'où ils lanceront leurs démarches administratives", comme les demandes d'asile. Dans le froid et face au vent, ils attendent depuis plus de 5 heures sans nouvelle du bus. L'association Utopia 56 propose aux femmes et aux enfants de s'abriter du vent dans un local en centre-ville, le temps que le bus arrive.
Photographie d'identité retrouvée dans l'herbe, au milieu de la jungle de Unicorn, à Calais
De Douvre à Calais, le ferry traverse cette immense étendue d'eau, cette mer devenue cimetière. D'abord, les côtes anglaises puis la plage de tous les départs. Le 10 décembre, le corps d'une personne a été retrouvé en mer par des pêcheurs au large de Calais.
À Calais, le Pidou est un supermarché spécialisé pour les camionneurs, dans la vente en gros et avec des réductions de taxes notamment sur les alcools. Tous les soirs sur le parking, des exilés tentent de se cacher sous les camions, afin de traverser la frontière franco-britannique. C'est pourquoi les forces de l'ordre sont sans cesse sur place pour surveiller les camions, n'hésitant pas à effrayer les exilés en rigolant et usant de la violence.
Nouvel an à Calais : la musique résonne dans la cour du Secours Catholique de la ville. La journée est à la fête pour les exilés et les membres de associations.
Le 31 décembre, au Secours Catholique de Calais, exilés et bénévoles ont partagé la piste de danse pendant le concert de Dallo, un rappeur soudanais qui raconte dans ses chansons le trajet du Soudan jusqu'à la frontière franco-britannique.
Dans la jungle de Stadium à Calais, des exilés érythréens célébraient le Genna, noël du calendrier julien. Aussi appelé Leddet en Ethiopie et Erythrée, le 7 janvier marque la naissance du Christ dans la religion orthodoxe. Un moment de fête autour du feu de camp, où l’on partage un repas chaud, près d’un rond-point de la ville.
La plage de Calais, le soir du nouvel an 2021. Des lumières en guise d'espoir et de commémorations, pour toutes les traversées et les naufrages à la frontière franco-britannique.
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